Image décorative.
© Alain Fischer

Grenoble : des vergers à croquer

Petits cousins des jardins partagés, les vergers collectifs parsèment les secteurs de la ville où les Grenobloises et les Grenoblois (re)découvrent, à deux pas de chez eux, le paillage, les bouturages, les oyas, la nature comestible et la saisonnalité. On y cultive surtout le bonheur d’être ensemble, à tout âge, entre voisins et voisines de tous horizons, et l’on croise la pelle et la bêche pour que d’autres puissent éclore dans le sillage de ces six îlots
de fraîcheur dont le tout-premier, le Verger Essen’Ciel, labellisé Éco-jardin, fêtera, fin 2024, ses dix ans.

Participation

Par Anna Figari, publié le 24 juin 2024

Article

Mon premier abrite un cerisier prolifique, mon second un figuier remarquable, mon troisième un néflier du Japon, mon quatrième des pommiers en espalier, mon cinquième regorge de poiriers, et dans mon sixième, un noyer voisine avec deux beaux noisetiers de Byzance. Mon tout constitue un chapelet de six vergers, des jardins plantés, aux quatre coins de Grenoble, d’arbres fruitiers mais aussi de plantes aromatiques et médicinales, de fleurs mellifères, et tenez-vous bien, de légumes anciens.

Où sont-ils ? Nichés ici et là, à l’abri des regards des passant-es pressé-es, bien connus par les habitant-es des quartiers qui, croyez-nous, se les sont bien appropriés.

À Grenoble, les vergers sont nés d’initiatives diverses : le projet lancé par la Ville dès 2014, visant la création d’«un verger par secteur», des Budgets Participatifs, du projet Jardinons nos rues et des chantiers ouverts au public (COP).

Le plus souvent, ils émergent dans des poches, des friches, explique Frank Quéré, responsable du service Espace public et citoyenneté. Certaines, parfois, sont pressenties pour une construction. La création du Verger Aventure (secteur de La Poterne, N.D.L.R.), c’était acter le fait que les habitant-es ne voulaient pas de parking, souligne Christophe Dupont qui, depuis 2016, s’implique bénévolement dans cette oasis de verdure de 4000m2, gérée par l’association Brin d’Grelinette.

Remettre les mains dans la terre

Au départ, un coup de pouce est nécessaire. Ainsi la Ville de Grenoble accompagne-t-elle l’éclosion en préparant le terrain par une analyse des sols notamment avant la plantation, précise Franck Quéré.

Elle reste présente pour des ajustements ou un accompagnement en fonction des besoins : la mise en place d’un bac permettant aux personnes à mobilité réduite de venir jardiner (c'est le cas du Verger Essen’Ciel), des ateliers paillage ou construction et installation de nichoirs, ou la création de jardins pédagogiques destinés aux écoles (à Salengro), histoire de faire classe verte dans le verger ! L’objectif ? Que les collectifs deviennent autonomes, au fil du temps.

Le sont-ils ? Affirmatif, au vu de l’engouement pour ce mode de jardinage aux multiples bénéfices. «Plus cool» car moins chronophage que le jardin partagé (un lopin de terre, il faut s’en occuper individuellement et constamment), le verger collectif est un moyen, finalement assez simple, de (re)mettre les mains la terre pour celles et ceux qui s’en sont éloigné-es, comme Françoise, Grenobloise d’adoption, dont le jardin en Normandie lui manquait, Anne, maraîchère de formation et jeune maman, Nicole, originaire du massif de Chartreuse, pour ne citer que quelques bénévoles actifs et actives !

Des lieux ouverts à toutes et à tous

Le verger, par tous les aspects qu’il recouvre – arboriculture, botanique, flore, refuge pour oiseaux… – est un puits de sciences et de techniques. Mais pas seulement. Car, avant tout, le verger est comestible – c’est ce qui le différencie du jardin – et vient rencontrer l’air du temps autour de l’alimentation saine, locale et de saison. Un bon vecteur pour sensibiliser les enfants !

Comestible mais aussi multiculturel, intergénérationnel – on y croise des poussins de 6 ans qui s’émerveillent près des coquelicots et se faufilent dans des tipis en saule, et des aîné-es de 80 ans, aux mains agiles. Pour mieux récolter ensuite ?

«Ces lieux sont ouverts à toutes et à tous, insiste Christophe. Ce que l’on veut, au Verger Aventure, c’est montrer le retour de la nature comestible, créer des liens pour et avec les habitant-es du quartier, et que tout le monde se l’approprie, d’où la Protection Judiciaire de la Jeunesse, qui vient nous aider pour l’entretien, les écoles, les Scouts de la Nature, la SNCF, les étudiant-es… Et si les jardiniers et les jardinières récoltent a minima, peu importe.»

Le plaisir est ailleurs… Dans le partage des récoltes et dans l’expérience humaine qu’il procure, fil vert du verger…

Bon à savoir

  • Les vergers sont des espaces ouverts à toutes et à tous, pour la récolte, la cueillette, le simple plaisir de flâner et d’observer le rythme et la temporalité des comestibles – ne les cueillez pas s’ils ne sont pas mûrs !
  • Envie de rejoindre le collectif d’un verger ? Adressez-vous à la Maison des Habitant-es de votre quartier ou au service Espace Public et Citoyenneté (EPV), Jardinons nos rues ou cliquez sur la plateforme Végétalise ta ville !
  • Ça infuse à La Villeneuve, qui accueille la Halle Iris, créée en lieu et place de l’ex-piscine éponyme, consacrée au bien-être et au bien-vivre. Son association s’attelle à la création d’un jardin aromatique avec une tisanerie, sur 100 mètres carrés.
  • Curieuses et curieux de nature ? D’autres vergers ont poussé dans l’agglomération grenobloise comme à Échirolles et à Varces. Celui de Beauvoir-en-Royans, baptisé le Verger conservatoire, géré depuis 2004 par l’association Les fruits retrouvés, a pris racine : il abrite désormais 232 arbres fruitiers.