Une conservatrice-restauratrice colore la dentition de la lionne Saïd à l'aide d'un pinceau fin.
© Auriane Poillet

Les lions du Muséum se refont une beauté !

Deux conservatrices-restauratrices sont intervenues sur toute une famille de lions qui appartiennent au Muséum de Grenoble. Gre.mag vous livre les coulisses de ce travail de passion et de patience.

Patrimoine et Histoire

Par Auriane Poillet, publié le 26 juin 2024

Article

Pendant une dizaine de jours au printemps, Soazig Négrel et Sabrina Vétillard ont formé le duo de conservatrices-restauratrices dédié à cette mission. La mission en question ? Rendre un état de conservation optimal des lions Saïd et Sarah ainsi que de leurs quatre lionceaux pour l'avenir.

Arrêt sur image

Dans les années 1850, Saïd et Sarah, venus d'Algérie, étaient les vedettes du jardin zoologique du jardin des Plantes qui venait d'être acheté par la Ville de Grenoble. Le Muséum était en train d'être construit. Il y aurait même eu un épisode où la lionne se serait évadée de son enclos ! L'histoire est malheureusement devenue tragique puisque la lionne Sarah est décédée alors qu'elle donnait naissance à ses quatre lionceaux. Les petits n'ont pas pu être sauvés. Saïd, lui, est décédé quelques temps après. Le jardin zoologique, qui n'était pas isolé à Grenoble, a alors permis d'alimenter les collections du Muséum. Dans les années qui ont suivi, la Société d'acclimatation des Alpes, un autre parc zoologique, a d'ailleurs été fondée de l'autre côté de la rue Haxo.

Revenons à nos lions à l'heure actuelle. L'objectif de cette intervention est de stopper les altérations et d'améliorer l'esthétique des lions. Dépoussiérer, nettoyer, combler... le travail était minutieux et chronophage.

Les deux conservatrices-restauratrices ont procédé par exemple à une remise en teinte des coussinets, de la truffe et des paupière pour mieux coller à une image naturaliste juste. C'est en nettoyant le spécimen, en le manipulant, que l'on découvre des choses», explique Soazig Négrel. «Ce sont souvent des coutures qui s'ouvrent ou des armatures qui dépassent.

Entre patrimoine et recherche

Parmi les tâches à réaliser : recréer du poil là où il en manque, si le conservateur a validé la proposition. L'armature qui constitue le «squelette» de l'animal a parfois rouillé, ce qui a pour effet de faire tomber la peau naturalisée, si l'armature est au contact de la peau.

Après avoir retiré la corrosion, elles appliquent dans un premier temps du papier japonais pour isoler l'armature. Puis, une pâte de fibre de cellulose est ajoutée pour combler la partie manquante. A l'aide d'adhésif, elles collent de la filasse de chanvre préalablement brossée pour recréer la texture du poil. Si besoin, elles colorent les faux poils afin de rendre l'intervention la plus discrète possible.

«Les morceaux de peau qui ne peuvent pas être replacés sont conservés», continue-t-elle. «Les animaux conservés en Muséum d'histoire naturelle restent des spécimens scientifiques. Il n'est pas impossible de devoir faire un prélèvement ADN un jour. Et ce seront ces morceaux qui seront utilisés préférentiellement. Un animal naturalisé est un objet entre patrimoine et recherche. Nous rédigeons aussi des rapports avec des photos et les localisations de nos interventions. L'idée est de rendre sa lisibilité à l'objet, de retrouver, si cela est possible, un bon état de rendu du vivant tout en intervenant le moins possible. C'est un équilibre à trouver.»

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