François Botton pose à l'Hôtel de Ville.
© Sylvain Frappat

François Botton : «Restaurer la tour Perret est un véritable défi technique.»

L'architecte a été choisi comme maître d'œuvre pour le projet de restauration de la tour Perret de Grenoble.

Patrimoine et Histoire

Par Anne Maheu, publié le 26 avr. 2019

Article

Qu'est-ce qui vous a incité à travailler pour la sauvegarde du patrimoine architectural ?

J'ai fait mes études d'architecture à Versailles et l'école est installée dans les Petites écuries du Roi. C'est là qu'est né cet intérêt pour la restauration du patrimoine.

Après l'obtention de mon diplôme d'architecte DPLG, tout en travaillant sur le chantier de restauration de la cour carrée du Louvre, je me suis spécialisé à l'École de Chaillot afin d'obtenir le titre d'architecte du patrimoine ; puis en 1990 j'ai passé le concours d'architecte en chef des monuments historiques (ACMH).

Qu'est-ce qui vous passionne dans ce métier ?

La diversité ! Je reste un généraliste : je suis très heureux dans les églises du XIIème siècle tout en étant passionné par les enjeux de restauration des édifices en béton dont toute une génération arrive à la limite de son espérance de vie, comme la tour Perret.

C'est à la Casamaures, en travaillant avec Vicat et l'atelier Avenier qui faisait les moulages, que j'ai acquis la connaissance de la singularité du béton. Puis j'ai eu l'occasion de travailler sur des édifices du Corbusier. Reconstruire Le Corbusier c'est terrifiant, car c'est une icône, mais c'est passionnant !

Comment est né votre intérêt pour la tour Perret de Grenoble ?

J'éprouve un intérêt spécifique pour la tour Perret depuis que je l'ai découverte dans le cadre de ma circonscription en tant qu'architecte en chef des monuments historiques de l'Isère.

A l'époque – c'était dans les années quatre-vingt-dix – j'ai encouragé le classement ; la tour a été classée Monument historique en 1998. Alors quand j'ai pris connaissance de l'appel d'offres de la Ville de Grenoble, je n'ai pas hésité à y répondre.

Que représente le projet de restauration de cette tour pour vous ?

C'est un véritable défi technique. La tour Perret de Grenoble est un chef d'œuvre, c'est le manifeste de L'ordre du béton de l'entrepreneur et architecte Auguste Perret. L'ordre du béton armé renvoie aux «ordres» grecs en architecture : les ordres dorique, ionique et corinthien avec des colonnes, des péristyles, etc. Il y a là une référence aux beaux-arts et à l'histoire de l'architecture.

Perret s'intéresse à la structure en architecture ; pour lui il faut qu'elle s'exprime car c'est là que réside la vérité, alors que pour les Modernes, qui se considèrent comme puristes, la structure peut être cachée. Il était pragmatique plutôt qu'idéologue mais il a conduit une véritable réflexion ce qui fait de lui aussi un théoricien et en ce sens, il n'était pas qu'entrepreneur.

Comment vous organisez-vous pour ce projet ?

J'ai réuni, et je dirige, une équipe qui comprend un laboratoire et un bureau d'étude structure, ainsi qu'un bureau d'études techniques pour les ascenseurs, un économiste, et des bureaux conseil en recherches documentaires, historiques, culturelles et patrimoniales. Il va falloir déconstruire et reconstruire certaines parties. Il faudra déterminer un curseur pertinent entre la conservation et la restauration/restitution.

Ce chantier nourrira la connaissance de la restauration des bétons à l'échelle internationale. J'ai suggéré d'intégrer la tour Perret dans un programme international qui réunit des laboratoires pour débattre des questions de restauration des bétons qui deviennent cruciales aujourd'hui. De ce point de vue la restauration de la tour Perret est une opération innovante : elle permettra de contribuer à l'évaluation des performances des réparations sur les structures historiques en béton.

L'ascenseur de la tour, une «problématique essentielle»

«La problématique de l'ascenseur est essentielle ; on peut dire que la tour habille l'ascenseur ; c'était le côté rationaliste de Perret, la fonction génère la forme ! Initialement, il s'agissait de permettre au public de monter à la plateforme de 60m de hauteur pour qu'il puisse voir l'Exposition internationale de la houille blanche et du tourisme d'en haut, et surtout la ville au coeur des montagnes. Il y a un concept de cabines apparentes à garder ; il y a également le côté dynamique de l'ascenseur qui traverse l'espace sans interrompre la lumière qui passe à travers les claustras... des rayons de gloire comme on en voit dans une église ! Il s'agit de restituer au mieux cette expérience sensorielle que l'on fait lorsque l'on visite la tour.»

Informations complémentaires

Adresse

parc Paul Mistral 38000 Grenoble

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